Représentation de la Chine à Hollywood : du racisme au soft power

A 11 h 30, le café Star Light était bondé de monde : des lycéens, des adultes, des personnes âgées… Même un bébé était présent pour la conférence de la géographe Nashidil Rouiai. Le Sujet ? Hollywood au service du pouvoir chinois ?Tout un programme !

Dès le début, le décor est planté. Le cinéma est un art, certes, mais c’est surtout un outil de puissance politique. Aux Etats-Unis le gouvernement pré-Seconde Guerre mondiale avait souvent un œil qui traînait du côté des productions américaines. Qui contrôle l’image contrôle la pensée… Après le conflit, cette propagande s’est transformée en soft power. Une façon de montrer la puissance américaine, sans passer par la puissance brute : mode de vie, culture…

Pendant toute cette période, les Chinois étaient davantage représentés comme des méchants. La conférencière s’appuie sur le personnage du “Fu Manchu”. Un docteur caricatural, stéréotypé, cliché… Pour aller plus loin dans le racisme, au cinéma le personnage était interprété par un blanc à qui on appliquait une yellowface, équivalent de la black face pour les personnes asiatiques. Cette représentation a duré jusque dans les années 80.

Une représentation qui évolue

La décennie marque une ambivalence, la République populaire de Chine est reconnue par les Etats-Unis en 1979, les mentalités évoluent. D’un côté le racisme est toujours présent, mais d’autres films essayent aussi d’ajouter une épaisseur historique et de montrer la Chine d’une autre manière, comme avec Le dernier empereur sorti en 1987. Mais le point de bascule intervient dans les années 90. Hollywood va prendre parti pour le Tibet, territoire autonome chinois en conflit avec Pékin. La Chine voit d’un mauvais oeil cette prise de position. Elle censure, empêche l’accès de son territoire à certains acteurs. Le message est clair : la Chine peut sanctionner.

Les représentations hollywoodiennes évoluent alors pour correspondre à une sorte d’idéal chinois.

Pourquoi ce virage ? Au cours des années 2010, la Chine devient le deuxième pays avec le plus de recettes au cinéma. C’est un marché indispensable et très fermé. Seuls 34 films étrangers sont diffusés chaque année. Chaque œuvre doit plaire au gouvernement chinois pour être diffusée. Ce quota peut être contourné si la Chine intervient dans le processus créatif. Encore une fois les contraintes sont multiples.

Autrefois vue comme un ennemi, la Chine va être dépeinte dans les gros blockbusters comme un allié, un sauveur. Les nouveaux méchants sont liés avec les enjeux géopolitiques du moment : les djihadistes, la Corée du Nord…

Mais ce soft power inversé a ses limites, car il dépend du marché financier chinois. Tout repose alors sur un équilibre fragile.