Inscrire le pouvoir dans le paysage : les gibets seigneuriaux des Vosges, du XIIIè au XVIIIè siècle
03/10/2025 de 20h00 à 21h00
RAON-LES-LEAU - Foyer rural de la Haute Vallée de la Plaine
Résumé
Affirmer son pouvoir dans le domaine de la haute justice est l'une des préoccupations des nombreux seigneurs locaux des Vosges, comme des ducs de Lorraine et des rois de France. L'affichage de leur autorité en la matière se concrétisait par l'implantation de signes ostentatoires : gibets, fourches et signes patibulaires. Ancrés dans le paysage, ces symboles n'étaient pas implantés à la légère. Des critères géographiques conditionnaient leur édification. En règle générale, on les dressait en limite des possessions seigneuriales, sur une colline ou monticule, à proximité d'un grand chemin. Leur vue s'imposait ainsi au plus grand nombre. Outre à l'exécution par pendaison de criminels ou délinquants, les gibets servaient également à exhiber -à titre pédagogique- les corps des suppliciés. Certaines juridictions des Vosges, telles les prévôtés d'Arches et de Bruyères, compte-tenu de leur importance, disposent d'un gibet permanent que les communautés se devaient d'entretenir, même quand son utilisation est devenue bien moins fréquente. Il en est de même pour les seigneurs locaux vassaux de souverains. Le gibet, contrairement à la potence dressée, en ce qui la concerne, pour l'occasion, s'inscrit de façon pérenne dans le paysage, jusqu'à la Révolution française. La suppression des justices seigneuriales prononcée le 4 août 1789, est actée, dans le détail, par des décrets, dont l'un enjoint de faire démolir les fourches patibulaires, gibets et piloris. En 1791, les autorités révolutionnaires s'emploient à faire systématiquement disparaître ces symboles de l'ancien pouvoir seigneurial. Les matériaux en sont dispersés. Les pratiques du pouvoir de la période de l'ancien régime ne subsistent qu'à titre anecdotiques dans la mémoire locale, appréhendées sous le prisme de l'école de la IIIème République. Le souvenir des lieux dédiés à affirmer matériellement ce pouvoir judiciaire subsiste néanmoins géographiquement. Les recherches permettent d'établir grâce aux toponymes ou micro-toponymes la présence des anciens gibets. Les lieux-dits tels que "Mont de la Justice", ou Haut des Fourches" ou encore "Haut de la Justice", figurent parmi les plus évidents. Ils ne sont pas les seuls, on en recense des dizaines que l'on peut mettre en relation avec les données historiques.