fotto

Les frontières : limites ou protection ?

Auteurs, baroudeurs, diplomates, reporters. Ainsi peut-on qualifier les intervenants de la conférence «Nature des frontières ? Sont-elles refuge, ouvertes ou fermées ?» animée par Eric Fottorino, lui-même écrivain et directeur du journal Le Un et des revues Zadig et America.

Chacun avec leur vécu, ils racontent leurs expériences des frontières, leurs visions. Pour Olivier Weber, écrivain, ancien grand reporter, correspondant de guerre et diplomate qui a passé sa vie à franchir des frontières, la prise de conscience a été rapide. «On traverse des frontières, mais on ne s’y arrête jamais. Parfois on se fait tabasser par des talibans, mais on y passe vite». Alors il s’est intéressé à ces peuples des frontières, qui forment presque «un troisième pays» avec une réglementation propre, où prolifèrent les trafics de drogue, d’armes et surtout les trafics humains. Ce qui le marque aussi, c’est le caractère identitaire d’une frontière «La frontière peut être injuste, mais elle est définissante et bornante du territoire voisin». En somme, une ligne fictive qui reconnaît l’identité du voisin.

Un ébranlement des limites.

Michel Foucher, actuel membre du Conseil des affaires étrangères, présente les frontières comme des limites que l’on se fixerait pour se rassurer. «Trump et son mur, Poutine et sa surprotection…», ce besoin de protection s’exprime par la construction de frontières. La mondialisation, la libre circulation dans l’espace européen ont détruit les limites «rassurantes» pour certains, limites matérialisées par des frontières établies par des politiques, un rapport de force ou par un traité international.

Des «murs» que l’on veut construire à l’image de Viktor Orban, premier ministre hongrois, ou de Donald Trump, président américain, pour contrer une «crise migratoire». Mais l’ancien ambassadeur de Lettonie se questionne. Connaît-on vraiment un «chaos» migratoire comme certains aimeraient le faire croire ? Pour Michel Foucher, en France, la réponse est non. La France n’est plus un pays d’accueil.

Permettre une ouverture d’esprit.

Le vainqueur du prix Amerigo-Vespucci du FIG 2019, Emmanuel Ruben, écrivain lyonnais ayant parcouru à vélo les 4000 km du Danube, d’Odessa à Strasbourg. Il a vu de ses propres yeux les Balkans se vider pour rejoindre l’Allemagne, des migrants d’Afrique du Nord rejoindre la frontière entre la Russie et la Norvège pour la franchir à vélo, les contrôles étant plus rares pour les utilisateurs de ce moyen de transport.

Un discours percutant pour un public averti, comme Monique employée à la bibliothèque municipale de la ville de Lyon. Les ouvrages géographiques c’est son quotidien. Le thème «Migrations», c’est la raison première de sa venue ici à Saint-Dié-des-Vosges pour le FIG 2019 auquel elle assiste pour la première fois. Pour elle, c’est une chance «d’entendre parler des gens qui ont vécu ce qu’ils racontent» explique-t-elle, émue à la fin de la conférence. «Ils nous aident à penser ce que nous avons du mal à penser».