« Je suis des dessinateurs qui ne savent pas dessiner »
Le grand entretien de Jul avait une allure de grand-messe. La voix du dessinateur s’est mélangée dans le résonnement de la cathédrale de Saint-Dié à celle de Jean Lebrun, animateur de La Marche de l’histoire sur France Inter.
Mais les deux hommes, tous deux agrégés d’Histoire, ont parlé de durant plus d’une heure de divers sujets: BD, évidemment, mais aussi de Chine et de cow-boy.
Pour commencer ce grand entreiten, Jean Lebrun a décidé d’emmener Jul en Chine, pays qu’il connait bien puisqu’il y a voyagé plusieurs fois et qu’il maitrise le chinois. « La Chine est un accident de parcours : j’aurais dû étudier l’arabe, mais je me suis fait virer le premier jour et j’ai dû changer de lycée. Ils ne proposaient pas de cours d’arabe, alors j’ai fait chinois ». Depuis, il a tissé un lien très fort avec l’Empire du Milieu, au point de participer au voyage officiel du président Macron en Chine en janvier 2018. « Lors du dîner officiel avec le président chinois, Xi Jinping, je lui ai refourgué un exemplaire en chinois de mon album « La planète des sages ». C’est inédit parce que là-bas, les dessinateurs de presse sont en prison », s’est remémoré le caricaturiste.
Jean Lebrun a ensuite amené le dessinateur à parler de sa discipline première : le dessin. « C’est venu un petit peu par hasard, à cause d’une histoire administrative. Si ça n’était pas arrivé, je serais probablement entrain d’enseigner l’anthropologie en Chine », spécule Jul. « Je suis des dessinateurs qui ne savent pas dessiner. Je ne suis pas dans la lignée graphique d’un Cabu mais plus d’un Wolinski, ou d’un Charb. Je n’ai pas de plaisir à tirer des traits parfaits, mais je préfère tracer des bonhommes pomme de terre qui me correspondent plus », analyse-t-il en se référant aux dessinateurs de Charlie Hebdo avec qui il a travaillé.
Bien loin du style des dessins de Charlie, Jul est également le dessinateur du prochain album de Lucky Luke, succédant ainsi à son créateur Morris : « Un cow-boy dans le coton » paraitra le 23 octobre prochain. Une nouvelle aventure qui emmène le célèbre cow-boy dans les champs de coton de Louisiane au temps de la ségrégation raciale : « C’est un des albums qui m’a demandé le plus de travail, car c’est un sujet lourd que je n’ai pas l’habitude de traiter ». Lorsque Dargaud, qui est aussi son éditeur, lui a proposé de donner une seconde jeunesse au cow-boy de 70 ans, Jul a directement accepté : « Je suis fan de Goscinny, et je me revendique de cet héritage ».
Le Grand entretien s’est terminé par une séance de dédicace, pour le plus grand bonheur des fidèles.