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« L'échange est permanent entre les deux mondes »



Voisins qui ne vivent parfois pas dans le même monde, l'Europe et le monde arabe ont des liens complexes. Pour les expliquer, les écrivains Camille Ammoun, Leïla Sebbar, le diplomate Michel Foucher et Patrick Vallelian ont débattu pendant une heure et demie au musée Pierre-Noël.

 

Michel Foucher prévient dès le début, parler des relations entre l'Europe et les pays arabes est un exercice complètement différent, que l'on parle de chaque individu ou des Etats. "Il y a une densité d'échanges vraiment très importante entre nos pays. Du commerce aux migrations en passant par les liens qui les unissent, nous avons presque une relation familiale avec ces pays. C'est assez surprenant de voir à quel point les relations entre les autorités de chaque pays sont médiocres."  Symbole de ce dialogue de sourds, il n'existe aucune politique euro-arabe. À l'échelle de l'Union européenne,  les presque seuls pays intéressés par le Sud sont la France, l'Espagne et l'Italie. Tous les autres regardent vers l'Est." Pourtant les cultures des deux régions du monde sont aujourd'hui mélangées, comme l'explique Camille Ammoun. "On n'est pas sur un clash des civilisations, ni sur le dialogue des civilisations mais je crois que nous sommes sur le mélange des civilisations. Chacune emprunte à l'autre, la langue évolue et les références se partagent. L'échange est permanent entre les deux mondes."

Pourtant le dernier rappel de l'ambassadeur algérien suite à une déclaration d'Emmanuel Macron montre bien que certaines cicatrices restent ouvertes entre les pays du Maghreb et leurs anciens colons. Comme le décrit le diplomate français, "la question, c'est comment dépasser ce passé douloureux ? Pour la question de la guerre d'Algérie, la France s'est investie dans ce travail de mémoire. Mais quoi qu'il en soit, ils ne peuvent pas faire ça tout seuls." Leïla Sebbar acquiesce : "En Algérie, le travail de mémoire, c'est zéro."

Le rôle de la littérature ?

Pour rassembler les deux côtés de la Méditerranée, l'animateur propose d'envisager le rôle de la littérature qui, par ses récits, pourrait aider les deux mondes à se comprendre. Pour Leïla Sebbar, tout cela n'est qu'une utopie. "Moi je ne crois pas à la fonction politique ou idéologique de la litterature. Il n'y a que trois livres qui ont eu un impact universel, la Bible, le Coran et le Petit Livre Rouge. J'aime le livre mais en temps qu'écrivaine, je ne joue aucun rôle." Au contraire, Camille Ammoun pense que "la littérature comme le cinéma ou la musique participe à créer des références communes qui peuvent souder tout le monde". De quoi créer la société civile qui manque cruellement de force dans le monde arabe ? C'est le défi qui se pose.