Pour les Français, la réputation gastronomique de l’Angleterre et des Îles britanniques en général est détestable.
Il existe pourtant une véritable tradition gastronomique vivante.chronique de Jean Robert Pitte Elle plonge ses racines dans la cuisine médiévale qui a largement disparu du territoire français (pies, boiled meats, pots, roasts, puddings, spicy, sweet and sour sauces, pickles, cakes) et dans des emprunts effectués au sein de l’Empire colonial britannique ou dans d’autres pays lointains (curries, chutneys, épices nouvelles variées, marmelades). L’Angleterre est aussi un pays produisant d’excellents fromages que l’on consomme après le repas, le chester ou le stilton, par exemple, ce dernier se mariant d’amour avec le porto.

Parmi les monuments de la gastronomie d’outre-Manche, citons le breakfast, le high tea, le pik-nik et ses sandwiches, particulièrement le sandwich au concombre, le fish and chips, le Christmas pudding, etc.
Les Anglais sont également passés maîtres en Europe dans l’art de préparer le thé.

Enfin, ils préparent les différentes boissons fermentées ou distillées de haute personnalité (ale, stout, cider, fruit wines, gin, whisky) et l’on assiste aujourd’hui à la renaissance de la production de vin, laquelle avait disparu depuis le Moyen-Âge. Elisabeth II a même fait planter un grand vignoble à vin blanc sur les coteaux de Windsor en vue d’élaborer son propre sparkling wine. Ce n’est qu’un retour aux sources. On ignore en effet souvent que le champagne mousseux est une invention anglaise née au XVIIe siècle à Londres. Les hivers froids du «Petit âge glaciaire» ne permettaient pas aux raisins de Champagne de mûrir correctement et les vins descendant la Seine puis transportés par vaisseau de mer depuis Rouen jusqu’en Angleterre étaient particulièrement acides. Ayant inventé la bouteille en verre épais et noir, obtenue grâce au nouveau combustible qu’est le charbon, ayant découvert l’intérêt du liège importé du Portugal pour boucher celles-ci et disposant de sucre de canne en provenance des Caraïbes, les négociants anglais ont imaginé d’adoucir le vin blanc –ou rose clair– de Champagne au moment de la mise en bouteille. La fermentation du sucre entraîne un dégagement de gaz carbonique dans la bouteille, maintenu prisonnier grâce au bouchon : c’est ainsi qu’est né ce produit appelé à un succès mondial.
Les Champenois, pour leur part, ont maîtrisé et utilisé le procédé à partir de 1715 et, depuis lors, l’ont perfectionné, en utilisant en particulier leurs crayères désaffectées, puis l’ont monopolisé. 

Les Anglais ont aussi joué un rôle essentiel dans l’émergence de vins et eaux-de-vie de très grande qualité hors les Îles britanniques : cognac, bordeaux, porto, sherry, madère, etc.

Jean-Robert Pitte

Membre de l’Institut